Alice Milliat, championne du sport féminin
Les biais misogynes du sport ont souvent la vie dure dans votre magazine. On n’est pas les seules. Alice Milliat a lutté toute sa carrière, toute sa vie pour combattre la phallocratie de cet univers qui, à son époque, était autrement plus fermé. Hommage à une grande dame.
En 1919, Alice Milliat présente, pour la énième fois, une requête au Comité international olympique (CIO) : ouvrir les Jeux d’Anvers aux épreuves féminines. Réponse ? Négatif. Le baron Pierre de Coubertin s’y oppose catégoriquement. Pour lui, la place des femmes est suffisante : soutenir les athlètes dans leurs efforts.
“Nous avons conscience d’avoir travaillé au mieux-être de la femme, à quelque classe sociale qu’elle appartienne” — Alice Milliat, lors de la 1e édition des Jeux Mondiaux Féminins
Qu’à cela ne tienne. Alice Milliat crée dès lors son propre Comité et institue les Jeux mondiaux féminins. Après avoir suscité le courroux de la gente masculine au sein de la Fédération olympique, le succès des éditions de 1922 et 1926 font bouger les lignes de résistance. Ainsi, Sigfrid Edström, président de la Fédération internationale d’athlétisme, propose alors à Alice Millat et à la Fédération sportive féminine internationale que les femmes puissent participer dans les jeux masculins à 5 des 13 épreuves d’athlétisme également prévues dans les jeux féminins. Il insiste pour rapprocher les deux fédérations, avec notamment une harmonisation des règlements techniques. Alice Millat refuse : elle voit dans ces propositions une tentative de mainmise sur le sport féminin. Mais les autres dirigeants de la FSFI acceptent. Une victoire qui ne durera pas puisque les épreuves féminines seront supprimées après les Jeux d’Amsterdam de 1928, au prétexte qu’elles sont trop dangereuses pour les femmes.
En 1936, le départ d’Alice Millat affectée par une maladie et des attaques contre sa stratégie, ainsi que les difficultés financières de la FSFI à laquelle les subventions ont été coupées signent sa disparition et l’arrêt des jeux mondiaux féminins.
Alice Milliat, un modèle du combat pour le sport féminin
Alice Milliat (1884-1957), nageuse, hockeyeuse et rameuse, est ainsi reconnue pour être l’une des plus grandes militantes du sport féminin en France et à l’international. Championne d’aviron, elle crée fin 1917 la Fédération féminine sportive de France (FFSF).
Les missions de la Fédération ?
- promouvoir le sport féminin,
- organiser des compétitions
- jouer un rôle de lobbyiste et surtout
- permettre aux athlètes de concourir ou de participer aux grandes épreuves du type Jeux olympiques.
Quelques dates et chiffres de ces prémisses du sport international, féminin ?
- La première édition des jeux mondiaux féminin se déroule à Paris en 1922, devant plus de 20 000 spectateurs.
- La première réunion d’athlétisme féminin se tient au stade Brancion à Paris en 1915.
- En avril 1918, le premier match officiel de football féminin se dispute à Paris. En octobre 1920, un autre match de football — France contre Angleterre — va rassembler pas moins de 10 000 spectateurs.
Les autres héroïnes du sport, telles Alice Milliat sont nombreuses. Quels noms vous viennent : nous leur consacrerons un article. Pour aller plus loin dans l’histoire du sport au féminin, lisez l’excellent ouvrage Les femmes dans le sport.