La FFC soutient le projet Les Bornées? On se pose beaucoup de questions
La FFC a reçu de l’État français une délégation de mission de service public pour œuvrer au développement du cyclisme de haut niveau mais aussi à celui du cyclisme pour tous. Comment justifier leur soutien au projet Les Bornées?
Le soutien de la Fédération Française de Cyclisme (FFC) pour un projet dont le titre est, on cite: « Objectif Etape du Tour 2018 : Féminisation et démocratisation du cyclisme ».
La goutte qui fait déborder le vase
Le soutien de la FFC pour le projet Les Bornées nous semble inapproprié.
Nous sommes très inquiets de la manière dont sont prises les décisions dans la FFC et sa capacité à porter un projet pour le cyclisme féminin. Certes, il manque des femmes affiliées à la la FFC. Les objectifs ne sont pas atteints. Dans le bilan de la FFC suite aux Etats Généraux, on lisait l’importance de créer une communauté. Mais est-ce que leurs dirigeants ne sont pas en train de tirer tous azimuts?
Nous trouvons scandaleux que la FFC labélise ce genre d’initiative privée, le projet Les Bornées, basée sur une récolte d’argent. Cela donne ainsi du crédit à une démarche qui va à l’encontre des valeurs du sport amateur et des bénévoles qui le font vivre.
Derrière le lien fourni sur le post Facebook de la FFC, on tombe sur une demande de financement participatif à concurrence de 6000 euros avec une vidéo et des choses diverses et variées et a acheter.
À quoi sert l’argent récoltée par le projet Les Bornées
1/ Financer le projet (à hauteur de 10% – dès février 2018) : logistique de l’événement (dossards, voyage, hébergement), matériel nécessaire à la pratique du sport.
2/ Financer l’ événementiel (40% – dès avril 2018) : logistique liée aux événements de groupes, goodies, coachings.
3/ Financer les équipements liée à la communication digitale (50% – dès février 2018) : matériel pour filmer, fixations, réalisation de shootings, réalisations vidéos.
La FFC fait un pied de nez au sport amateur
Faire du sport, c’est donner de soi pour atteindre les objectifs qu’on se donne. Les cyclistes amateurs connaissent cette formule. La fédération est bien au fait.
- Actuellement, le cyclisme amateur a de plus en plus de difficulté à se financer.
- Les équipes amateurs peinent à boucler les budgets.
- Les cyclistes féminines se demandent tous les jours si cela vaut la peine de poursuivre le haut niveau au regard de leur difficulté à concilier vies personnelle, professionnelle et sportive.
Et pourtant, La FFC labélise une initiative en opposition à cette valeur centrale du sport, du don de soi. Ces deux femmes attendent les dons des autres pour faire du sport. Par exemple, elles offrent une sortie à vélo en leur compagnie, une « Girls Ride », si le contributeur verse 25 euros.
La FFC méprise ainsi les milliers de bénévoles
Faire du sport, c’est aussi donner aux autres. Tous les jours, des bénévoles s’investissent dans les clubs, se battent pour trouver des moyens financiers pour permettre à leur club de survivre, d’emmener à moindres frais de jeunes cyclistes pour participer aux compétitions.
À la publication du post sur la page Facebook de la FFC, dans un commentaire, une bénévole, s’étonnait de la promotion de cette opération, alors que, signalait-elle, le cyclisme amateur était souvent démuni. Ce commentaire a été supprimé dans la journée ajoutant au dédain du sport amateur, le mépris à la parole des bénévoles.
En effet, il y avait 5 commentaires au départ. Il n’en reste qu’un seul, le nôtre, aujourd’hui. Facebook annonce d’ailleurs: « Meilleurs commentaires est sélectionné, certains commentaires ont peut-être été filtrés. »
Une FFC éloignée de sa base
Béatrice BARBUSSE, auteure du livre « Du sexisme dans le sport », fait partie des intervenants réguliers dans les réunions organisées par la FFC. Elle indique dans ce livre que les évolutions possibles en faveur d’une plus grande mixité du sport passeront par les acteurs de terrain, ceux qui interviennent directement auprès des sportifs, les bénévoles. Ce n’est pas en les dédaignant ou en les méprisant qu’on gagnera les batailles de la mixité
EFDV a refusé de partager le projet les Bornées
Il n’est pas possible que nous exposions nos lectrices/lecteurs à une opération de promotion aux contours mal définis.
L’Étape du tour, c’est une des cyclo les moins accessibles au niveau financier et au niveau de l’accessibilité physique (Sold out depuis des semaines) et sportive. En effet, la cyclo EDT coûte très cher, est rapidement complète tellement la médaille de Finisher est convoitée. Il faut une solide expérience pour la terminer correctement, sans se blesser. L’EDT n’est pas à la portée de tous et peut être dangereux si on est mal entrainée!
Un second volet est évoqué, « démocratiser, féminiser, partager et digitaliser le cyclisme ». Pour cela, elles comptent organiser des évènements, des happenings, des sorties, tourner des films de présentation de l’entraînement…
Il faut bien admettre qu’en cinq mois, il est difficile de mettre en œuvre tout ce qui est prévu. De plus, le projet ne repose sur aucun fondement solide, à ce jour : aucun club, aucune association, aucun site internet, aucune page Facebook. Elles n’ont aucun relai sur le terrain.
Un financement participatif de 6K
La levée de fonds de 6000 euros soutenue par la FFC nous paraît indécente au regard des conditions d’exercice des cyclistes féminines actuelles.
- Près de 50% des cyclistes femmes faisant partie des équipes UCI gagnent moins de 5000 euros par an.
- Les amateurs sacrifient une grande partie de leur temps libre, de leurs vacances, voire de l’argent pour pouvoir vivre pleinement leur passion.
- Il s’agit de 6000 euros pour du matériel et de la logistique uniquement, soit des moyens purs et durs.
Sans aucune compétence spécifique, les filles du projet Les Bornées vont devenir « monitrices de cyclisme » et faire du « coaching global ». Avant de labelliser l’initiative, la FFC s’est-elle assurée qu’elles avaient les diplômes requis pour être rémunérées pour ces prestations ou alors d’autres le feront à leur place?
À aucun moment, la personne de la FFC qui a autorisé la labellisation de cette opération n’a pris conscience que, dans le cadre de son engagement au sein de la FFC, elle devait être garante de l’intérêt général et non des intérêts particuliers. Les deux femmes ne représentent aucune association, ne sont affiliées à aucune fédération. L’argent qu’elles touchent de cette levée de fonds est déposé sur un compte d’entreprise privée détenu par l’une d’elles. Une association légalement créée aurait été plus rassurante pour garantir le succès de l’opération, non?
Notre conclusion sur le soutien au projet Les Bornées
Le cautionnement de la FFC pour une pareille action privée nous semble vraiment aller à contre-sens des valeurs actuelles et parait contre-productif à la féminisation du cyclisme et sa démocratisation.
On souhaite cependant que les 2 cyclistes amatrices, outillées par les sponsors, payées par le public, éduquées en communication, réussissent leur projet de féminisation et de démocratisation du cyclisme. Le montant de la cagnotte est atteint. Tout est donc réuni pour y arriver.
Par contre, nous déplorons le soutien de la FFC pour la collecte du projet Les Bornées.