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Que faire en cas d’accident à vélo? Comment apprendre de ses erreurs

Que faire en cas d’accident à vélo? Comment apprendre de ses erreurs

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Il y a quelques mois, j’ai vécu une scène si souvent redoutée : un accrochage avec une voiture. C’est mon premier accident à vélo.

J’avais rendez-vous en milieu de journée dans une zone artisanale assez mal desservie en infrastructures. Il me fallait passer absolument par un rond-point qui m’a toujours rendue nerveuse mais qui était la seule voie routière possible.

Venant de ma droite à la première sortie, une voiture s’est engagée sans réellement ralentir pour me céder le passage. Je l’ai vue se projeter devant moi sans pouvoir y faire grand-chose. À peine ai-je eu le temps de me déporter un peu sur la gauche pour tenter de l’éviter : son rétroviseur a embouti mon coude et mon guidon, me renversant au milieu de la voie. Aucun témoin : personne ne venait derrière, fort heureusement. Je n’avais en tête que de me ruer vers le trottoir le plus proche mettre en sûreté, convaincue que l’automobiliste fuirait sans demander son reste.

Cependant, la conductrice s’est arrêtée et est sortie de son véhicule, incrédule. Elle ne m’avait pas vue et tentait de s’expliquer la situation car pour elle, je n’étais pas là quand elle a regardé et donc j’avais forcément fait une manoeuvre qui m’avait cachée et me mettait en tord.

Assommée par la décharge d’adrénaline, j’étais à bout de souffle. J’avais à la fois envie d’engueuler et de rassurer la pauvre dame qui était aussi paumée que moi : que faire lors d’un accident à vélo ? Que faire lorsque l’on renverse accidentellement un cycliste ?

Appeler les pompiers ou la police

Dès qu’il y a des dommages corporels, il faut appeler la police pour qu’elle fasse le constat en présence du conducteur et d’éventuels témoins.

Ce fut ma première erreur : je me savais blessée car une douleur fulgurante me tenaillait le coude, mais sous l’effet de choc, je tentais de me rassurer, je ne voulais pas déranger pour si peu. En retirant ma veste, j’ai pu constater une série de plaies au niveau du coude même si j’arrivais à le plier. En vérité, j’en avais plusieurs autres au mollet, à la cuisse et la hanche et même une à la poitrine que le médecin a détectées de nombreuses heures plus tard car je n’en avais pas du tout conscience. En effet, sous le choc, le corps envoie une décharge d’adrénaline pour mieux encaisser et survivre, supprimant ainsi certaines douleurs qui n’émergent que plus tard.

Nous aurions dû appeler les pompiers et attendre leur aide : ils ont l’habitude de ce genre de situations. Ils auraient mieux cadré la situation, minimisant l’affect et m’assurant de recevoir les premiers secours.

Notez que si les pompiers et/ou la police interviennent sur les lieux de l’accident, ils rédigeront un procès-verbal d’accident à remettre à votre assureur en plus du constat amiable lorsque celui a été fait.

Prévenir un délit de fuite

La dame s’est précipitée vers sa voiture pour aller me chercher de l’eau et moi, j’ai dégainé mon téléphone tout en bégayant : « Pardon madame, je dois prendre votre plaque en photo ! » Je tremblais tellement que j’ai dû m’y prendre à trois fois avant que la plaque ne soit pas floue…

J’avais lu ô combien de récits d’accrochages entre automobilistes et cyclistes dans lesquels le conducteur avait choisi de passer son chemin. Ma conductrice me l’a dit : elle a senti un truc, mais elle n’a absolument rien vu. C’est en tentant de regarder dans le rétroviseur qu’elle a vu qu’il était arraché et qu’elle a pris la décision de s’arrêter.

Si vous n’êtes pas gravement blessée, tentez de noter ou de photographier rapidement la plaque d’immatriculation du véhicule qui vous a heurtée. S’il y a des témoins, prenez en note immédiatement leur numéro de téléphone et leur identité et fournissez-leur vos coordonnées.

Selon le code pénal, un délit de fuite est « Le fait, pour tout conducteur d’un véhicule […] sachant qu’il vient de causer ou d’occasionner un accident, de ne pas s’arrêter et de tenter ainsi d’échapper à la responsabilité pénale ou civile qu’il peut avoir encourue […] ».

Si vous êtes victime d’un délit de fuite, il vous faudra porter plainte et obtenir un maximum de preuves de l’accident, notamment via la déposition des témoins. Si le conducteur n’est pas retrouvé, vous pourriez obtenir l’indemnisation de vos préjudices corporels via le fond de garantie des assurances obligatoires. Si le conducteur est retrouvé, il risque une suspension de permis jusqu’à cinq ans et des sanctions pénales pouvant aller jusqu’à trois ans d’emprisonnement et 75,000 € d’amende. Si tel est votre cas, mieux vaut obtenir un conseil légal éclairé pour maximiser vos chances d’être indemnisé.

Je réalise à présent toute la chance que j’ai eue d’avoir une conductrice qui prend ses responsabilités en remplissant un constat et en déclarant l’accident, d’autant qu’il n’y avait aucun témoin direct de l’impact !

Remplir un constat amiable

accident à vélo

Ma conductrice m’a ramené un peu d’eau pour faire couler sur mes plaies et pour que je boive car je cherchais encore à reprendre mon souffle. Mon guidon de vélo était tordu, je savais que je ne pourrais pas repartir en roulant. J’avais de la difficulté à analyser la situation et à déterminer la prochaine chose à faire pour « faire les choses correctement ». La dame tentait plutôt de s’expliquer l’accident dont finalement elle ne savait rien. Selon elle, je n’étais pas assez visible, trop au milieu du rond point, pas assez, j’aurais dû prendre la piste cyclable (absente dans le rond point), le soleil avait dû l’éblouir…

Je savais ce rond-point dangereux – il est en pente, plutôt serré et une voie émerge de sous un viaduc, ce qui nuit à la visibilité. Il n’y a cependant pas de trottoir ni de passage piéton. La prudence aurait voulu qu’elle ralentisse. J’avais la priorité, mais je n’avais surtout aucun moyen de la voir arriver ni de faire un contact visuel avec elle. En somme, je comprenais son imprudence et je compatissais, mais il me semblait tout à fait clair qu’elle était responsable de notre accident. Dans tous les cas, on n’allait pas en débattre sur place : le rond-point était étroit, nous y étions vulnérables et nous gênions la circulation.

J’ai été soulagée de voir que plusieurs personnes ont ralenti et m’ont demandé si ça allait ou si j’avais besoin d’aide. Je me suis dit que si elle s’était enfuie ou avait refusé de collaborer, j’aurais eu du soutien. J’ai décliné leur offre mais je sentais que ma conductrice voulait repartir. Elle était en retard pour un engagement et a d’abord refusé de me ramener, prétextant que sa voiture était trop petite. J’étais en vélo de route alors j’ai insisté : je voulais me rendre à l’hôpital dans les plus brefs délais. Elle finit par accepter de me ramener chez moi – je vis à proximité de l’hôpital. Une fois dans la voiture, nous nous sommes posé la question du constat. Elle n’en avait pas avec elle. Je n’étais pas certaine que ce soit pertinent, d’autant que je me référais à mes expériences québécoises.

J’avais tort : même si ce n’est pas toujours très clair à la lecture de ce document, le vélo est un véhicule aux yeux des assureurs et du code de la route. Il faut donc toujours remplir un constat amiable pour chaque paire de véhicules impliquée dans un accident. Le constat est une protection pour les parties impliquées qui bien souvent ne se connaissent ni d’Eve ni d’Adam. Rédiger un constat n’empêche pas, par exemple, de choisir un règlement à l’amiable. Vous disposez d’un délai de cinq jours ouvrés pour choisir de déclarer ou non l’accident à votre assureur. Rien ne presse : ces décisions peuvent et doivent souvent être prises un peu plus tard, lorsque tout le monde s’est calmé et que l’on connaîtra l’étendue des dégâts…

L’idéal aurait été d’avoir les témoins sur place lors de l’établissement du constat, mais dans notre cas, il n’y en avait pas.

Si la personne refuse d’établir un constat, appelez la police ou les pompiers même si vous n’êtes pas blessée.

Enfin, avant de quitter les lieux, prenez un maximum de photos permettant de comprendre le contexte de l’accident : la signalisation routière, la position des véhicules, les traces de pneus, les débris de verre, etc. Autre erreur de notre part qui nous aura valu bien des échanges houleux quant au lieu exact de l’impact dans le rond-point au moment de faire le croquis !

Se rendre à l’hôpital ou voir un médecin

En arrivant à la maison, j’ai rangé mon vélo à la cave, je me suis coulé un café et je suis repartie à pied vers les urgences.

Si l’on a des blessures, il faut impérativement consulter un médecin afin de mesurer leur étendue et obtenir des soins, mais surtout le certificat descriptif qu’il faudra fournir à votre assureur. C’est sur ce certificat que sera établie la durée d’une éventuelle Interruption Temporaire de Travail (ITT).

accident à vélo

Dans mon cas, tous mes interlocuteurs m’ont signalé que je devais avoir ce certificat signé par le médecin avant de quitter l’hôpital : la réception a mis dans mon dossier un document ou c’était écrit en gros « Faire un certificat descriptif », l’infirmier du triage me l’a rappelé… Puis, en salle d’examen, j’ai découvert que mon grand plateau avait mordu mon mollet à travers mon jean, lacérant la peau en une superbe scarification cycliste… J’ai vu le médecin et j’ai passé des radios : heureusement, je n’avais rien de cassé ! J’ai pu quitter l’hôpital quelques heures plus tard, mes plaies soigneusement pansées.

Au besoin, sachez que les assurances peuvent prendre en charge les aides nécessaires découlant de l’accident, par exemple une aide à domicile pour le ménage, etc.

Déclarer l’accident à son assureur

Ma conductrice a pris de mes nouvelles le soir même, puis le lendemain, me confiant avoir très mal dormi. Elle a décidé de tout déclarer à son assureur, même si ça devait entacher son dossier parfait.

Le cycliste n’étant pas couvert par une assurance véhicule, c’est auprès votre assureur en responsabilité civile qu’il convient de déclarer l’accident et de déposer votre copie du constat dans les cinq jours. Cette procédure ne vous empêche pas de choisir un règlement amiable avec le conducteur, mais vous permet d’assurer vos arrières pour le cas où vous ne pourriez vous entendre. Demandez simplement à votre assureur d’attendre votre confirmation avant d’établir un recours contre l’assurance du tiers. Conservez des copies de tous les documents.

Notez que si l’accident a lieu sur votre trajet domicile-travail et que vous avez des dommages corporels, il s’agit d’un accident du travail qu’il faut aussi déclarer auprès de votre employeur. Enfin, depuis la loi Badinter du 5 juillet 1985, on considère le cycliste comme fragile et donc victime dès lors qu’il y a des dommages corporels lors d’un accident de la circulation impliquant un véhicule à moteur terrestre, sans égard à la responsabilité de l’accident – à moins d’une faute inexcusable.

Estimer les dégâts matériels et faire réparer son vélo

Pour ma part, je voulais faire évaluer les dégâts chez un vélociste et obtenir un devis pour réparation. Malheureusement, ma boutique habituelle était aux abonnés absents le lendemain de l’accident.

A vue d’oeil, il semblait y avoir très peu de dégâts. Seule la potence me semblait tordue et je n’étais même pas certaine qu’elle le soit. J’ai donc ramené mon vélo à l’atelier participatif près de chez moi pour qu’un des mécanos bénévoles l’inspecte rapidement. Miraculeusement, la potence avait simplement pivoté sur son axe sans plier. Il n’y avait vraisemblablement aucun dommage !

Songez néanmoins à bien évaluer la totalité des dommages matériels, pas seulement ceux de votre vélo : vos vêtements, vos accessoires, ce que vous transportiez, votre casque, votre téléphone portable, etc. Révisez le devis afin de vous assurer qu’aucune pièce n’a été oubliée ou estimée à la baisse. Il n’est pas nécessaire qu’une pièce soit inutilisable pour pouvoir la faire remplacer, il suffit qu’elle ait été abîmée lors de votre accident vélo !

Porter plainte (s’il y a lieu) après un accident

Si le constat ne peut pas être rempli, s’il est clairement de mauvaise foi ou si les assurances de la partie adverse ne donnent pas suite à vos doléances, sachez que vous pouvez choisir de porter plainte jusqu’à un an après l’incident.

Gérer le stress post-traumatique d’un accident à vélo

Je ne m’attendais pas à vivre un traumatisme avec un accrochage aussi bénin. Après tout, je n’en avais pas du tout vécu autour de ma chute de vélo solaire en plein milieu du Kazakhstan lors du Sun Trip 2013, alors même que je m’étais fracturé une côte !

Était-ce le fait d’être si près de chez moi ou le côté tout à fait incontrôlable de l’accident ? Je ne sais pas. Toujours est-il que j’ai trouvé la remontée en selle bien plus difficile que je l’imaginais. Autour de moi, il n’y avait plus des voitures, mais des tonnes de tôle peinte, des tanks équipés pour la guerre. Je tremblais d’effroi dès que j’entendais le grognement agressif des moteurs à essence. Ma conduite était devenue hyper défensive et j’avais besoin de débriefer après chaque sortie, si courte soit-elle.

 

accident à vélo, tenter de se rendre visible!

J’ai rapidement compris que je souffrais de stress post-traumatique, un syndrome court pouvant s’étendre sur quelques semaines avec l’accident. Je revivais l’événement à chaque intersection et je me suis mise à éviter autant que possible les ronds-points. J’avais même du déplaisir à monter en selle et j’ai cessé d’utiliser mon vélo pour des sorties de loisir, me limitant aux trajets essentiels de ma vie sans voiture.

Soyez patiente avec soi-même et réexposez-vous  graduellement. Petit à petit, j’ai repris mes marques. J’ai aussi compensé en investissant dans du matériel de visibilité et de sécurité plus complet, confortable et stylé, histoire d’être toujours le plus visible possible. Certaines personnes m’ont même conseillé un avertisseur sonore à 115 décibels, mais je me suis contenté de vêtements et d’un éclairage de jour.

À présent, près de six mois après cet accident à vélo, je n’y pense plus du tout quand je roule et j’ai à nouveau du plaisir!

Remerciements

Merci à @tzim pour son soutien en direct entourant mon accident. J’ai aussi puisé de bons conseils dans les articles suivants :

 

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Globestoppeuse devant l'éternel et co-auteur de la Bible du grand voyageur (Lonely Planet), Anick-Marie s'est d'abord frottée au vélo solaire en se rendant au Kazakhstan en solo lors du rallye Sun Trip. Férue d'écomobilité, elle explore les combinaisons intermodales pour découvrir son nouvel environnement alpin en mode bikepacking minimaliste : le train, le covoiturage et pourquoi pas le vélo-stop ?

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Commentaires (1)

  • Erick

    Prendre en photo l’autocollant de l’assurance.

    répondre

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